Rechercher
Accessibilité
Signes
Ensemble, favorisons l'autonomie

Portrait métier #13 Nicole MINGUET – Médecin généraliste

19 juin 2023

Présentation générale :  

« Je m’appelle Nicole, j’ai 35 ans, j’ai grandi à Marseille et j’ai fait la Faculté de Médecine à la Timone après mon baccalauréat. Je suis mariée, j’ai deux garçons de 5 et 3 ans. J’ai passé ma thèse en octobre 2015 après deux ans de remplacement en médecine générale de cabinet, mais je n’ai pas trop accroché à ce type d’exercice où je me sentais assez seule. J’ai rencontré la directrice de l’époque en consultation, elle m’a parlé de l’institut IRSAM Arc-en-Ciel, j’ai postulé et j’ai ainsi rejoint IRSAM en décembre 2015. Je ne connaissais pas du tout le monde « du handicap », mon expérience s’est construite « sur le tas ». J’ai découvert des professions et spécialités inconnues, des acronymes compliqués à retenir, des formalités administratives complexes, d’autres réseaux, une autre manière de fonctionner, avec un équilibre à trouver entre le monde du social et la santé, où le rôle du médecin n’est pas central mais complémentaire. J’ai également travaillé sur des petits temps à l’ERHR PACA Corse à sa création (et je l’ai réintégrée à mon retour de La Réunion), à l’EAM IRSAM Le Garlaban et au Centre d’Enseignement Professionnel pour Déficients Auditifs (CEPDA) IRSAM La Rémusade (aujourd’hui appelé IRSAM IRS de Provence) pendant mes deux premières années.

En 2018, mon mari a eu une opportunité professionnelle à La Réunion et j’ai eu la chance de pouvoir travailler là-bas pendant deux ans toujours au sein de l’Association IRSAM (mon deuxième est né là-bas) à l’Institut IRSAM La Ressource à Sainte Marie et au CAMSPS IRSAM Les Jacarandas à St Denis, ce qui m’a permis de voir d’autres manières de fonctionner dans la même association, de découvrir d’autres problématiques aussi et d’aborder d’autres moyens d’intervention. J’ai également rencontré des professionnels exceptionnels que j’ai eu du mal à quitter ! J’ai énormément appris auprès d’eux et notamment auprès de ma consœur ophtalmologue Julie DASSIE qui travaille dans le médico-social depuis longtemps. Le travail avec une équipe plus petite au sein du CAMSPS a beaucoup facilité les échanges, et m’a permis de mieux cibler et prioriser mes actions. J’ai pu mieux comprendre ce que l’on attendait de moi et mieux m’organiser en conséquence. 

Quand je suis revenue à IRSAM Arc en Ciel, j’avais acquis une expérience et une connaissance qui ont facilité mon exercice au sein de la structure qui est beaucoup plus grande ! 

J’ai la chance de pouvoir compléter ma formation pendant deux ans en faisant un DU de pédiatrie : cet aller-retour entre la théorie et la pratique est assez vital car en médecine on n’a jamais fini d’apprendre et de se mettre à jour. »

Votre métier / votre mission / votre équipe :

« Je suis médecin généraliste au sein de l’institut IRSAM Arc en Ciel à 70% et sur l’ERHR Paca Corse à 10%. Mon rôle est de coordonner les parcours de soins au sein de l’institut conjointement avec l’ophtalmologue et les psychiatres selon les besoins observables des enfants, de mettre en place des protocoles d’hygiène et de soins généraux ou individualisés, de faire le lien avec les médecins extérieurs et les familles ainsi qu’avec les équipes sur les profils des jeunes, les vigilances à avoir, les activités possibles. Je consulte environ 150 enfants qui présentent des pathologies très diverses et plus ou moins complexes et rares, plus ou moins stables : c’est compliqué de trouver le temps de mener à bien tous les projets, de rencontrer régulièrement tant les jeunes que les professionnels, d’être disponible pour chaque pôle. Depuis que je suis arrivée, je dirais même que c’est ma difficulté principale, et souvent ça me donne l’impression de ne pas être totalement efficace. Heureusement que je peux m’appuyer sur les équipes médicales, paramédicales, rééducatives et éducatives qui se montrent toujours compréhensives et savent venir me solliciter. 

Je ne suis pas censée être le médecin traitant des jeunes accueillis mais bien souvent, je suis amenée à suivre régulièrement certains jeunes avec handicaps associés pour qui un examen de santé via le cursus classique est difficile à organiser. Je dois aussi m’assurer que les jeunes en internat puissent être accueillis dans de bonnes conditions. 

Au sein de l’ERHR Paca Corse, je m’assure que les profils des personnes demandant un soutien relèvent bien de nos possibilités d’accompagnementJe me renseigne aussi sur les pathologies (certaines très spécifiques, très rares) pour essayer de cibler et traduire les enjeux pour l’équipe, même si évidemment une personne ne se résume pas à sa pathologie. Cela permet d’apporter un regard complémentaire et d’avoir une vision pluridisciplinaire des situations avec la pilote, les référents de parcours et les référents techniques. Être médecin peut aussi pas mal faciliter les échanges avec le milieu de la santé, milieu parfois fermé à des professionnels du médico-social (par manque de temps, de connaissance). J’ai eu l’occasion cette année d’échanger à plusieurs reprises avec les autres médecins des ERHR et de centres de compétences quand il y en a, sur nos pratiques et nos interventions, c’est très enrichissant. 

Votre rôle au milieu des autres métiers / complémentarités :

« Cela a été long et parfois fastidieux de découvrir autant de métiers et de professionnels réunis autour d’un même jeune et de trouver un équilibre, une place entre toutes les interventions. 

Je suis très attachée à mon rôle de soignant, d’expert en santé, au raisonnement et à la démarche scientifique, à notre obligation de moyensJe crois au rôle primordial des rééducateurs dont les interventions ont su montrer, séances après séances, et années après années, leurs bénéfices non discutables dans l’amélioration ou la compensation d’une déficience chez une personne avec handicap.  Je suis très reconnaissante car j’ai toujours eu le sentiment que l’on respectait ma place de médecin. De même, je suis vigilante à ne pas déborder sur des domaines de compétence que je n’ai pas et de respecter la place des autres, comme on le fait pour moi. 

C’est cette expertise fine dans chaque domaine qui créé la vraie richesse et la pluridisciplinarité nécessaires à un accompagnement de qualité. »

Vos relations avec les jeunes et les familles : 

« D’une manière générale, cela se passe plutôt bien ! C’est difficile d’être entièrement disponible, mais j’essaie d’être présente au maximum auprès des jeunes. J’ai l’impression qu’ils viennent facilement vers moi. 

Je suis plutôt spontanée dans mon approche et j’essaie d’être le plus ouverte possible sur les choix de vie des uns et des autres, c’est plus facile pour échanger et discuter sur des sujets parfois compliqués à aborder, et pour par exemple encourager par la suite certains changements quand ils comportent des risques pour la santé.

Pour les situations compliquées et tendues, ce qui arrive un peu plus régulièrement depuis la Covid, c’est très appréciable d’être en équipe pour apaiser les conflits quand ils surviennent et réagir posément et de manière réfléchie. »

Vos priorités / vos initiatives / vos envies / vos besoins :

« Ma priorité est que l’enfant puisse être accueilli au maximum en étant en sécurité et épanoui, lui assurer un parcours de soin conforme à ses besoins. Je fais partie du COPIL VIAS (Vie intime affective et sexuelle) et j’aime énormément ce qu’on y construit, j’ai l’impression que ça va être utile, que ça va faire avancer les droits des jeunes de l’Institut, aussi en sécurisant et en prévenant les risques de maltraitance et d’abus. On a également commencé un travail avec les cuisines et la diététicienne d’API pour remettre à plat les régimes des jeunes et équilibrer au mieux en fonction de leurs besoins nutritionnels parfois très spécifiques, j’en attends beaucoup car l’alimentation est quand même la base de la santé. 

Fluidifier l’information dans le respect du secret professionnel, me rendre plus disponible pour les rééducateurs, informer et faire de la prévention auprès des équipes sont des besoins que je perçois mais pour lesquels il est vraiment compliqué de trouver du temps. J’aimerais aussi beaucoup que l’on ait l’occasion d’échanger sur la pratique avec les équipes des autres instituts (je pense notamment à La Réunion), et même entre médecins. 

L’informatisation des dossiers médicaux est l’autre grande étape indispensable que j’attends avec impatience, elle permettra de sécuriser, fluidifier, regrouper et retrouver des informations importantes et de faciliter et rendre plus efficace l’exercice médical et infirmier dans l’institut. Aussi, pour que l’on puisse coller aux besoins spécifiques des enfants, le recrutement d’une orthophoniste, et d’un pédopsychiatre me semblent indispensables car la déficience sensorielle et notamment visuelles s’accompagnent de besoins spécifiques qu’il faut savoir anticiper, repérer, et accompagner. Mais la demande est forte et il est difficile d’en trouver… »

L’Association IRSAM, c’est quoi pour vous ?   

« Partout où j’ai travaillé à l’Association IRSAM, j’ai perçu une grande bienveillance et surtout une grande ouverture envers les personnes accueillies et la volonté de les accompagner de la manière la plus individualisée possible. Tout n’est pas parfait évidemment, mais le fondement de départ est bon et c’est encourageant.

Ensuite, il y a une très grande technicité, une forte compétence générale des professionnels de l’association et notamment à l’institut IRSAM Arc-en-Ciel. Des personnes ressources, des personnes formées régulièrement sur différents sujets, et une volonté générale d’avancer avec son époque. J’aime aussi son histoire particulière !  »

Votre regard sur le handicap, la fragilité…

« J’ai parfois le sentiment que le handicap n’est pas forcément là où on l’attend. Les capacités de résilience familiale et personnelle, l’investissement, la disponibilité et la bienveillance de l’entourage ont un rôle majeur dans l’accompagnement et l’accès à l’autonomie d’une personne avec handicap. Mais cela demande beaucoup d’énergie, d’ouverture, de lâcher-prise. Or, ce n’est pas évident du tout et pas forcément naturel pour tous et il faut accepter cette réalité. Dans ces cas-là, notre action à nous est primordiale et peut faire la différence.  »  

Une anecdote ?

« J’espère que les collègues qui me connaissent sauront reconnaitre mes efforts pour avoir un langage correct… 

J’avais un arrière-grand-père sourd qui faisait partie d’une association mais ce n’était pas sur Marseille. »
Aller au contenu principal