Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis Sœur Marie Josiane, membre de la Congrégation des Sœurs de Marie Immaculée, héritière d’une tradition de longue date de service auprès des personnes en situation de handicap sensoriel. Notre Congrégation, avec les membres associés et les bienfaiteurs, porte depuis le XIXᵉ siècle l’élan initié par le père Louis Toussaint DASSY et Marie BOUFFIER, à l’origine de l’œuvre établie sur la colline de Notre-Dame de la Garde et devenue par la suite l’Association IRSAM.
C’est dans cet engagement quotidien auprès d’enfants sourds ou aveugles, puis auprès de leurs familles, qu’est née la Maison Béthel, à Pont Saint Esprit, fondée en 1991, pour proposer un lieu de vacances et de répit adapté à leurs besoins.
Comment êtes-vous entrée dans l’histoire de l’Association IRSAM ?
L’Association IRSAM est intimement liée à notre Congrégation : cela fait partie de notre ADN institutionnel et spirituel. Pendant des siècles, l’enfant handicapé était considéré comme un « visage inutile ». Les fondations religieuses, dont la nôtre, ont contribué à un réel éveil des consciences : ces enfants sont devenus des visages à accompagner, puis des personnes à rendre heureuses.
Cet héritage, profondément humaniste et spirituel, irrigue encore aujourd’hui l’action IRSAM. C’est dans ce sillage que s’inscrit mon engagement : offrir aux enfants et à leurs familles un accompagnement global, respectueux et chaleureux.
Vous êtes aussi la fondatrice de la Maison Béthel : comment cette initiative est-elle née ?
Au début des années 1990, il nous fallait aller plus loin pour répondre aux besoins que nous percevions : celui du vivre ensemble et celui de l’accompagnement global de l’enfant et de sa famille.
La Maison Béthel a été créée pour mêler enfants entendants et enfants déficients auditifs dans des séjours communs, proposer un cadre bienveillant et familial, et offrir aux familles un répit bien mérité. L’objectif était clair : permettre aux enfants et aux familles de vivre autrement, d’être heureux et de se ressourcer.
Nous avons compris que l’enfant ne peut être accompagné sans sa famille. La Maison Béthel devait donc répondre à leurs besoins, leur offrir du répit, les rassurer et leur permettre de se recentrer sur eux-mêmes.
Trente ans plus tard, cette intuition s’est révélée juste : les frères et sœurs prennent naturellement le relais pour accompagner l’un des leurs, lorsque les parents ne sont plus là.
Qu’est-ce qui fait l’originalité de Béthel et de l’Association Louis Toussaint Dassy ?
Deux originalités majeures :
Le vivre ensemble : enfants entendants et enfants sourds partagent des moments de vie commune depuis 1991, créant des liens durables.
L’accompagnement global de l’enfant et de sa famille : offrir du répit, du soutien et un cadre bienveillant pour tous, au cœur de l’action associative.
Béthel est devenue une famille, avec ses bénévoles, ses donateurs et ses administrateurs, fidèle à l’esprit de Louis Toussaint Dassy et à la tradition de notre Congrégation.
Quel est votre rôle aujourd’hui au sein de l’Association IRSAM et de la Maison Béthel ?
Aujourd’hui, les enfants d’hier sont devenus des jeunes adultes, voire des adultes vieillissants. La mission se poursuit, adaptée aux nouveaux besoins. Nous travaillons sur la transmission de Béthel et sur son intégration au sein de l’Association IRSAM, tout en préservant l’esprit familial qui fait sa particularité.
Lors de récents échanges, j’ai pu préciser :
Nos statuts nous donnent un cadre, et il nous appartient de juger de la manière de mettre en œuvre les décisions.
La délégation de certaines tâches administratives ou de gestion est une bonne nouvelle, permettant de garder l’essentiel : l’esprit de famille.
La formation de nouvelles sœurs prend du temps (environ 5 ans), mais Béthel reste toujours innovante et répond aux besoins actuels.
Le projet sera construit avec l’Association IRSAM pour assurer la continuité et la qualité de l’accompagnement, tout en respectant la notion de « famille de Béthel ».
Cette réflexion sur la transmission illustre notre volonté de continuer l’aventure, tout en accueillant de nouvelles énergies pour pérenniser l’œuvre.
Quel sens donnez-vous à cet engagement aujourd’hui ?
Béthel reste avant tout un lieu de vie, de repos et de respiration, où chacun — enfant, jeune, adulte — peut entendre cette parole simple :
« Tu as le droit de te reposer. Tu as le droit d’être accueilli. Tu as le droit d’être heureux. »
C’est cette conviction, cette fidélité à notre engagement religieux et à notre histoire associative, qui guide encore notre action aujourd’hui. L’aventure continue, et nous souhaitons la poursuivre avec tous ceux qui partagent cette vision du bien-être des enfants et de leurs familles.