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Le « salon sonique », un projet artistique sonore et musical

8 décembre 2023

     Le salon sonique

Un projet artistique sonore et musical.
Automne 2023

Projet porté par
l’association Image Clé
dans le cadre du dispositif
Rouvrir le monde
DRAC PACA – été  automne 2023

avec
le musicien Loïs Lazur
et la réalisatrice radio
Mélanie Métier

 

Dans nos foyers, depuis quelques années déjà, l’approche sensorielle musicale et sonore est utilisée lors d’activités, d’ateliers de découvertes ou de détente. (S’amuser sur ou avec instruments réels ou virtuels sur tablettes, écoute de musiques, relaxation musicale en salle Snoezelen, ateliers danse et chants signes). Nous proposons également de nombreuses sorties concerts, opéra, festivals, fête de la musique…

« Pourquoi donc ? Surtout pour un foyer qui accueille des personnes sourdes ?

Sourd ? Le terme de « déficience auditive » est plus approprié.

Une personne atteinte de déficience auditive n’est pas forcément sourde. Parmi nos résidents, certains sont malentendants, certains atteints de déficience auditive profonde, certains entendent un peu, certains sont appareillés, d’autres non, mais la musique, les sons produisent des vibrations, une énergie.

Souvent, il faut monter le son très fort. Parfois les vibrations d’un haut-parleur peuvent suffire. Certains instruments, lorsqu’on les prend en main, qu’on les serre contre soi, sont capables de résonner sur nous, et puis rien que de tenir une guitare électrique parfois, ça peut transformer, on prend le rôle à cœur, on joue, on fait le show devant les autres, on s’amuse et on partage pleins de choses, des émotions, des sourires.

Nos résidents sont réceptifs et ils adorent s’exprimer au-delà des mots, des signes. » (Thierry)

https://www.irsam.fr/garlaban-ruissatel/2021/12/23/hard-ou-classique-la-musique-adoucit-les-moeurs/

Le salon sonique est un projet sonore et artistique qui a été proposé à notre direction par le duo Loïs Lazur (musicien) et Mélanie Métier  (réalisatrice radio) en partenariat et avec le soutien de La DRAC PACA ainsi que « culture, santé, handicap et dépendances »  PACA.

Le but était de réaliser des ateliers de création musicale et sonore durant 15 jours au sein de notre établissement.

« L’objectif est de réaliser des instruments de musique simples, avec des éléments glanés du quotidien, soit issu du recyclage, soit issu de collectes dans la nature. Nous ferons de la musique ensemble par des moyens adaptés à chacun.e : appuyer sur un bouton d’une machine dans lequel un son a été enregistré, aller enregistrer ensemble un bruit ou un son que l’on aime, taper en rythme sur un objet, etc. C’est par la coordination générale que nous chercherons à produire ensemble des sons qui nous plaisent. » (Loïs et Mélanie)

Pour Loïs et Mélanie, il était important de pouvoir résider la journée au sein de notre lieu de vie. Pouvoir faire connaissance avec nos résidents, s’intégrer pleinement et s’imprégner de leur quotidien, de leurs habitudes, leur personnalité, leur caractère, leurs difficultés mais aussi pour pouvoir repérer leurs appétences.

« Pour ce faire, le projet est d’installer un salon sonique, c’est-à-dire un endroit, un lieu de détente – que nous choisirons ensemble – où nous réaliserons ces instruments de musique, dont l’usage pourra être lié à une activité du lieu (…) mais aussi n’avoir aucune utilité. Ces «instruments pour rien» pourront alors être appropriés par résident·es de passage par notre salon lors des ateliers. » (Loïs et Mélanie)

Ces rencontres et ces premières approches étaient essentielles et primordiales pour comprendre et repérer leur rapport à l’autre, à la différence, aux sons, à la musique, aux vibrations et tout ce qui est du ressenti, du sensoriel, de leurs envies de communiquer ou non ,et pour chacun, de leur désirs de s’exprimer à leur façon, avec leur personnalité, leur histoires de vie, leur parcours et leurs signes distinctifs et chaque chose qui fait qu’ils sont des individus à part entière.

« [Nous vivons à Marseille mais proposons de résider la journée dans le lieu de vie aux côtés des habitant·es, afin de participer comme n’importe qui aux tâches et à la vie quotidienne. C’est à partir de ce quotidien-là, de ces sons-là ]…, que nous collecterons ensemble des sons (des sons documentaires donc, qu’ils soient paroles ou bruits) et des objets (objets du quotidien mais aussi éléments glanés dans la nature ou issus de rebus, de recyclage de choses usées ou abandonnées). » (Loïs et Mélanie)

Avec Loïs et Mélanie, nous avons pu réfléchir et choisir un lieu, une salle dédiée à ce projet, un lieu qui soit bien identifiable par nos résidents désireux d’y participer. L’ancienne salle d’accueil du foyer de la Rémusade à été choisi pour sa claretée et son apparence « ouverte » (grande baie vitrées avec beaucoup de plantes et d’arbres visibles de l’intérieur).

Loïs et Mélanie ont pris le temps d’aménager et d’investir ce lieu pour qu’il puisse être identifiable pour les ateliers à venir. Nous y avons apporté les  instruments déjà utilisés au foyer (2 guitares, un clavier, quelques instruments de percutions, des amplis et micros) et Loïs à ramener un peu du matériel électronique (boite à rythmes et autres synthé, loop station) ainsi que du matériel de bricolage pour soudures et autres créations d’instruments).

« Notre accueil et notre présentation auprès de l’équipe et des résidents se sont déroulés dans une atmosphère volontaire et bienveillante, ce qui nous a immédiatement mis en confiance, malgré la barrière que la langue des signes aurait pu représenter. Ce sentiment de bien-être s’est maintenu tout au long de la semaine. » (Loïs et Mélanie)

« Nous avons commencé par organiser deux ateliers pour rencontrer les résidents et les faire pratiquer avec les instruments, afin d’évaluer leurs sensations et leurs capacités. Ces séances étaient ponctuées de moments d’écoute, grâce à des ballons gonflés à l’hélium disposés à différents endroits de la salle. Nous avons également positionné les enceintes de manière à favoriser une immersion sensorielle optimale, afin d’adapter au mieux nos propositions. Ces premiers ateliers nous ont agréablement surpris, tant par l’enthousiasme et l’intérêt manifestés par les participants que par leur capacité à interagir et à suivre des instructions simples concernant les intensités et la coordination de mouvements rythmiques basiques. » (Loïs et Mélanie)

« L’objectif pour notre 2ème semaine sera de constituer des groupes séparés et en plus petit nombre, adaptés en fonction des auditions et compétences de chacun•e, pour approfondir leur pratique musicale et commencer à répéter et composer des choses plus précisément. »

« Notre deuxième axe de travail consistait à aller à la rencontre des résidents, à découvrir leurs lieux de vie et à commencer à collecter et enregistrer des sons du quotidien, des éléments sonores extérieurs, des fragments de conversations et d’autres ambiances sonores, accompagnés en partie par le personnel qui nous a fait visité et partagé la vie du lieu. Les premières prises de son et ballades que nous avons réalisé nous ont permis de mieux comprendre comment les résident•es vivent, et nous ont donné de bonnes idées pour la création sonore finale. Notamment, nous aimerions réaliser quelques temps privilégiés d’enregistrement des vocalises que les habitant•es produisent, qui pourraient être une base de composition sonore, en incluant leurs voix comme instrument. Nous avons aussi découvert que certaines personnes peuvent entendre les bruits en mettant le casque de prise de son et le micro au volume maximal, ce qui a donné lieu à une belle scène avec Karine notamment, qui a pu entendre la voix de sa mère 🙂 L’objectif pour notre 2ème semaine sera de réaliser de meilleures prises de son de ces différentes ambiances des lieux que nous avons repéré cette semaine, ainsi que d’enregistrer de manière isolée les vocalises de chaque résident•es afin de composer une sorte de sonothèque de leurs voix. » (Loïs et Mélanie)

« Le troisième axe s’est concentré sur l’adaptation et la construction d’instruments pour faciliter l’accès des résidents à la pratique musicale en fonction de leurs déficiences motrices et de leur surdité. Nous avons réalisé un instrument  de type ‘basse monocorde’ et testé des instruments à air avec des tubes pvc vendredi dernier. L’objectif pour notre 2ème semaine sera de réaliser et tester d’autres instruments, afin que chaque personne participante aie à la fin de la 2ème semaine un ou plusieurs instruments qui lui conviennent et lui plaisent. » (Loïs et Mélanie)

« Riches de ces collectes, nous pourrons alors nous atteler à fabriquer, assembler, tordre ces différents éléments pour en faire des instruments, ou assembler les sons par le biais de machines électroniques (flûte faite maison, raquette de ping-pong sonore, guitare monocorde, Synthétiseur à pied, etc.). Autant que possible, nous serons partant·es pour faire des liens avec des pratiques existantes, des ateliers déjà en place. » (Loïs et Mélanie)

« À la suite de ces diverses expériences, nous avons identifié plusieurs domaines dans lesquels nous pouvons améliorer notre travail, notamment en ce qui concerne les ateliers proposés aux résidents. La principale difficulté réside dans la disparité des perceptions musicales entre les personnes malentendantes et les personnes sourdes. Les niveaux sonores élevés peuvent déranger certaines personnes, tandis que d’autres ont besoin d’un volume plus élevé pour ressentir les vibrations des instruments et des enceintes. L’adaptation des instruments et leur fabrication sur mesure nécessitent également une approche plus individualisée pour répondre au mieux aux différents handicaps des résidents. » (Loïs et Mélanie)

Mercredi 20 Septembre 2023

Les résidents étaient assis sur leur chaise en demi-cercle avec chacun un gros haut-parleur dessous puis nous leur avons donné en main un ballon gonflé à l’hélium, le ballon était accroché aux HP ou à leur chaise de façon à pouvoir le voir, le prendre ou le laisser pour jouer d’un instrument.

Au départ nous leur avons demandé de jouer chacun leur tour d’un instrument pendant que les autres regardaient, ressentaient les vibrations et les sons de façon à prendre en compte l’autre, que chacun avait une importance, une caractéristique soit différente soit similaire à eux même.

Dans un second temps, nous leur avons donné pour consigne de jouer tous ensemble. En partant de quelque chose de calme, doucement, bas puis progressivement et naturellement, en prenant soin de prendre en compte les autres, d’augmenter le rythme (ce qui se fait tout seul car en général dans ce genre d’exercice, il y a un genre de pulsation qui se met en place et chacun se calle dessus, ce qui c’est effectivement produit).

À la fin, nous avons essayé d’échanger un peu sur la session. Je leur ai demandé à tour de rôle ce qu’ils avaient ressenti, s’ils avaient entendu et/ou ressenti les autres, leurs instruments, s’ils avaient aimé la séance.

Ils ont tous beaucoup apprécié et ont demandé à revenir par la suite.

Jeudi 21 Septembre 2023:

« Exercices de travail sur rythme et improvisations en rapport.

Pas simple ce matin pour que les résidents arrivent à se synchroniser (peut être que l’utilisation de la boite à rythme pourrait aider, même si les sons sont puissants et bien ressentis par les résidents, il manque aussi un peu  le coté visuel qui irait avec).

Samira semble plus avoir envie de ressentir que de participer, elle semble rechercher les sensations et dans un premier temps, ne souhaite pas se saisir d’un instrument.

David cherche aussi les sensations, ne prend pas vraiment les autres en compte dans un premier temps.

Il était sur le clavier puis a essayé la percussion. Ensuite il s’est rapproché de lui-même du haut parleur et  à voulu s’asseoir juste à coté, puis devant, cherchant à positionner son dos pile sur la source sonore. À un moment, il s’est levé et a voulu danser avec moi et Mélanie.

Jean-Luc est celui qui à semblé le plus investi avec le micro. Il était alors bien loin de ses préoccupations du quotidien, cela lui a beaucoup apporté.

À plusieurs reprises, le rythme est venu, plusieurs ambiances se sont installées et beaucoup de plaisir pour les résidents. Au final, une bonne sensation d’avoir partagé un excellent moment ensemble, d’avoir « fait groupe ».

Vendredi 22 Septembre 2023 :

 » Séance « relaxation musicale » en salle Snoezelen avec Théo, Glenn, Alex B et Samira.

Théo voulait aller sur le tapis vibrant comme la dernière fois, Glenn a préféré le lit à eau (je lui ai fait toucher le tapis avec les mains mais il a préféré le lit).

Alex et Samira ont alterné fauteuil et lit à eau puis tapis vibrant pour Alex B.

Tous calmes et attentifs, ils semblaient apaisés. Aucune vocalise de la part d’Alexandre et Théo qui n’a pas bougé du tapis durant toute la séance. Quelques sourires de Théo, Samira et Alex durant les différentes écoutes.

À la fin de la séance Théo m’a spontanément fait un check avec les deux mains, Samira a suivi et a fait de même. »

(Présentation détaillé de l’application « Music Care » utilisé pour les séances :
https://www.youtube.com/watch?v=OsKUcu4Pons)

Lors des ateliers il s’est passé beaucoup de choses, de nombreuses réactions face aux sons, aux vibrations, beaucoup de ressentis, de sensations, d’échanges, de sourires et parfois même de fous rires. Quelques danses improvisées, Alex M s’est improvisé chanteur et à assuré le show lorsqu’on lui a passé sa chanson préféré « Have You Ever Seen The Rain » du groupe Creedence.
Jean-Luc à adoré fredonner au micro. David F et Alexandre B, sur certaines vidéos, ont semblé avoir été entrainés vers un  voyage sonore lors des séances d’écoute de morceaux.  Jennifer s’est bien saisi des différents instruments. Samira, parfois passive et uniquement centré sur les effets que cela semblait lui procurer, parfois actrice de ses propres sons a beaucoup apprécié ces moments.

Lors d’exercices en groupe, il était  souvent très difficile de trouver un rythme, de se caller sur des pulsations, des vibrations et cela était parfois compliqué de laisser la place sonore à l’autre, de se concentrer sur soi mais en même temps laisser s’exprimer l’autre, trouver une sorte de dialogue dans la cacophonie qui émergeait, essayer de trouver ou de se placer sur une fréquence.

Une expérience qui leur a beaucoup plu visiblement. Entendre ou ressentir le son, les vibrations de sa voix amplifiée au micro, prendre conscience de son action sur une corde, sur un instrument, de sa place au sein du groupe, de sa particularité, sa singularité, son identité sonore. De bien belles expérimentations sensorielles partagées tout au long de ces sessions soniques !

L’équipe de communication IRSAM a permi de nous mettre en relation rapidement avec les artistes qui proposaient ce projet mais nous a aussi mis en lien avec les diverses associations qui soutenaient cette belle initiative et nous remercions grandement tout ceux qui ont permis que ce projet puisse voir le jour :

Loïs Lazur et Mélanie Métier

Hélène Krick de l’association AMI

AMI – Aide aux Musiques Innovatrices La Friche La Belle de Mai.

La DRAC PACA ainsi que « culture, santé, handicap et dépendances » région PACA

Mais le projet sonique ne s’arrête pas là ! Car  à la suite des ces ateliers, des échanges et des rencontres avec différentes personnes impliquées dans le milieu associatif et culturel, nous avons été invité à une soirée concerts sur Marseille le mercredi 22 novembre et 7 de nos résidents ont pu, à cette occasion, essayer toute la soirée des gilets vibrants pour plus d’immersion et de sensations soniques !

De plus il est aussi prévu d’aller retrouver prochainement Loïs et Mélanie pour une visite d’un studio d’enregistrement professionnel.

A bientôt donc pour la suite de ce projet ! 

Thierry

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